Marseille, été mouvementé

Avec le départ de Jorge Sampaoli et l’arrivée d’Igor Tudor sur le banc de l’Olympique de Marseille, le club phocéen vit un nouvel été chargé malgré la qualification en Ligue des Champions acquise la saison passée. La deuxième place de Ligue 1 n’est pas un gage de sérénité à Marseille, et la défaite 3-0 face à Norwich en match de préparation est venue rappeler que le mercato n’était pas (encore) à la hauteur des ambitions.

Il en faut peu pour passer de l’euphorie au catastrophisme du côté de Marseille, et si la réalité se situe entre les deux c’est en tout cas une période agitée pour les phocéens, le Président Pablo Longoria, et le nouvel entraineur Igo Tudor. Arrivé récemment dans le sud de la France pour remplacer Jorge Sampaoli, Tudor a forcément un peu de retard dans sa préparation et ses mises en place tactiques autant que dans les cibles du mercato. C’est d’ailleurs cette dernière donnée qui a fait jeter l’éponge à l’ancien entraineur argentin, lassé de ne pas voir son équipe évoluer avec des arrivées de joueurs confirmés. Marseille a recruté Isaak Touré, un très prometteur défenseur central gaucher, quand Sampaoli espérait selon les rumeurs des noms comme Griezmann et Dybala. Un gouffre qui situe bien la différence au niveau des attentes entre un club qui doit flairer les bons coups et un entraineur qui espérait des joueurs au salaire avoisinant les vingt millions d’euros par an pour Antoine Griezmann.

La feuille de route concernant le mercato est pourtant annoncée de manière plutôt claire, recruter des joueurs qui pourront évoluer et apporter une plus-value lors d’une éventuelle revente, ce qui est le cas avec Isaak Touré acheté pour 7 millions d’euros et qui possède une très belle marge de progression. L’autre cas de figure consiste à recruter des joueurs qui sont des opportunités de marché comme c’est le cas avec Samuel Gigot par exemple en provenance du championnat russe. Libre de tout contrat, le défenseur entre dans le même cas de figure que la dernière recrue de l’OM avec Chancel Mbemba, arrivé au terme de son contrat avec le club de Porto. Ces deux joueurs représentent une certaine expérience, mais l’OM n’a aucunement l’intention de débourser des indemnités de transfert importantes pour renforcer son effectif dans ce mercato estival jusqu’à présent.

L’OM aurait pu éventuellement s’appuyer sur des ventes et des départs pour consacrer une enveloppe plus importante au rayon des arrivées, mais c’est ici une des autres problématiques d’un club qui ne parvient pas à opérer en ce sens. Bouba kamara, qui était certainement la plus grande valeur marchande de l’effectif est parti libre, pour zéro euro, vers Aston Villa en Premier League, et Marseille peine à vendre les joueurs en fin de contrat comme Duje Caleta Car, Alvaro Gonzalez, Kevin Strootman, ou Steve Mandanda. Le gardien historique de l’OM s’est engagé avec le Stade rennais mais n’a pas rapporté un centime non plus dans les caisses olympiennes après avoir été gracieusement libéré. La politique de vente est difficilement lisible d’autant plus que le propriétaire McCourt ne semble plus vouloir mettre la main au portefeuille et le budget dont dispose Longoria est extrêmement serré.

En plus d’un mercato délicat, l’OM apprend une nouvelle philosophie

Ne pouvant s’appuyer sur des arrivées régénératrices et une ambition au niveau du mercato, l’OM doit également composer avec la volonté d’un nouvel entraineur qui diffère en tous points de son prédécesseur. Sampaoli a longtemps mis l’accent sur une volonté d’avoir la possession du ballon, d’évoluer avec un bloc équipe très haut sur le terrain pour maitriser techniquement les matches tandis que Tudor souhaite animer l’OM avec une tout autre philosophie de jeu. L’entraineur croate est davantage tourné vers un jeu de transition rapide, avec la volonté de profiter des espaces dans le dos des adversaires. Ce n’est d’ailleurs pas anodin si Diego Simeone est une référence pour lui, puisque Tudor implique davantage un système défensif qu’il veut rendre solide avant de penser à la construction du jeu et à la création. Une philosophie, qui d’un point de vue personnel ne me plait absolument pas, et la rencontre amicale face à Norwich a montré toutes les difficultés à mettre en place cette identité quand le secteur défensif n’est pas le point fort de l’équipe.

Marseille a perdu 3-0 ce match face à une équipe de deuxième division anglaise, avec un secteur défensif extrêmement friable sur chaque situation adverse, et forcément un secteur offensif qui peine à comprendre une quelconque animation puisque ce n’est pas une donnée qui entre en compte. Jouer vite vers l’avant, trouver Bakambu dans la profondeur, utiliser des pistons dans les couloirs, ou l’unique Payet dans l’axe, cela semble extrêmement sommaire pour un club comme l’OM. L’utilisation d’un joueur comme Gerson montre également les lacunes de l’entraineur pour créer le jeu, puisque l’ancien de Flamengo évolue à un poste de numéro 10 qui est deux crans au-dessus de ce qu’il a l’habitude de produire. Marseille peine à être solide, est assez inexistant dans une création beaucoup trop sommaire, et pour ne rien arranger envoie des joueurs pendant 70 minutes sous un cagnard assourdissant après une préparation plutôt intense physiquement. La logique est difficilement lisible à tous les points de vue.

Il est évidemment bien trop tôt pour tirer des conclusions, pour tirer la sonnette d’alarme, d’autant plus que le Président Pablo Longoria vient à nouveau de réitérer son envie d’accélérer sur le marché des transferts. Dans le schéma actuel de l’OM, avec cinq défenseurs, l’absence d’un autre meneur de jeu et d’un joueur capable de conserver le ballon est une donnée extrêmement importante. Marseille possédait ce profil avec Amine Harit la saison dernière, mais le joueur n’est toujours pas revenu et il faudra des idées qui frôlent le génie pour trouver des solutions adéquates désormais.

Emmanuel Trumer