Bruno Génésio, l’enfant rejeté

Après 3 ans et demi d’exercice de ses fonctions sur le banc de l’Olympique Lyonnais, Bruno Génésio va quitter le club rhodanien à la fin de la saison. Une nouvelle attendue par les supporters de l’OL, et approuvée par un Président qui a sacrifié une relation de travail précieuse pour tenter de faire évoluer son club. C’est en tout cas ce que j’espère, et le nom du prochain entraineur en dira certainement davantage. Toujours est-il qu’il est l’heure du bilan pour Bruno Génésio.

« Ce matin, j’ai annoncé à mes joueurs que je ne serai plus l’entraîneur de l’OL la saison prochaine ». Par ses mots, Bruno Génésio a officiellement mis un terme à son aventure sur le banc lyonnais le 13 avril dernier, quelques jours après une élimination face au Stade Rennais de Julien Stéphan au Parc OL, l’élimination de trop pour un entraineur qui aura perdu le soutien de ses troupes au fil des résultats décevants, des choix parfois difficilement lisibles, et d’une communication qui a pu agacer ses détracteurs.

Tout avait pourtant bien commencé pour Bruno Génésio et l’OL, lui l’enfant du club présidé d’une main de fer par Jean-Michel Aulas depuis plus de 30 ans. Génésio a eu une carrière de joueur, qu’il a débuté à Lyon avant de poursuivre un temps ailleurs. C’est ensuite à nouveau à Lyon que l’entraîneur Génésio va commencer son apprentissage, en tant qu’adjoint. Lorsque les clés de l’équipe professionnelle lui sont offertes, Génésio hérite d’une équipe en difficulté. Au milieu de la saison 2015-2016, il remplace Hubert Fournier et récupère un effectif positionné à la 9eplace de Ligue 1. Qualifié en Coupe d’Europe en début de saison mais éliminé de toute compétition européenne après des résultats décevants. Annoncé prudemment jusqu’à la fin de la saison, Génésio termine 2eet se voit donc confirmer dans ses fonctions. 

Bruno Génésio et Jean-Michel Aulas, un duo qui aura duré 3 ans et demi

Pour comprendre le cycle de Génésio à Lyon dans son ensemble, il faut prendre en compte le contexte spécifique à l’OL, et également les moyens dont a disposé le coach rhodanien lors de son mandat. Choisi par le Président Aulas, Génésio était une garantie pour le Président lyonnais de pouvoir travailler en harmonie avec un coach qu’il connait parfaitement (Génésio a intégré le staff de l’OL en 2005), et qui avait pour mission de titiller un concurrent qui agace autant qu’il semble amuser le Président lyonnais, le Paris Saint-Germain et son puissant propriétaire émirati. Il faut dire que le dernier trophée rangé dans la vitrine du Président date de 2012 et d’une Coupe de France remportée face à Quevilly. Depuis, c’est le calme plat, et même s’il me semble impossible de concurrencer le PSG sur un championnat de 38 journées, de par la différence abyssale de l’effectif parisien face à ses concurrents nationaux – Monaco l’a certes fait avec Leonardo Jardim sur le banc, mais l’effectif concocté par le directeur sportif de l’époque Luis Campos additionné au talent de Jardim a abouti à une superbe performance – l’OL a eu l’opportunité à plusieurs reprises de former un rempart consistant à l’ogre parisien, des opportunités ratées. Cette saison écoulée, la dernière de Bruno Génésio sur le banc de l’Olympique Lyonnais ressemble fortement aux deux précédentes, et là se situe certainement le problème. 

L’histoire se transforme en cauchemar

Encore en course pour le podium et une qualification en Ligue des champions cette saison, l’OL ne sera cependant jamais parvenu à créer une atmosphère propice à une évolution positive, pour ses joueurs comme pour son entraîneur. Cet OL est tellement reconnaissable que les points perdus en fin de saison, de manière anormale dans le contenu face à des adversaires moins forts, n’ont même plus étonné. L’élimination face au Stade Rennais de Julien Stéphan, le futur vainqueur, a précipité la chute d’une aventure longtemps entretenue par la volonté du Président Lyonnais, profondément convaincu des qualités humaines de l’entraîneur Génésio. Une relation maintenue contre vents et marées cette saison et qui aura finalement atteint le vestiaire lyonnais. Un vestiaire qui aura toujours respecté et soutenu son entraineur au fil des saisons, comme d’un commun accord avec une Présidence qui a le contrôle, mais qui aura également toujours été conscient des limites de perspective d’évolution. Le meilleur exemple est le capitaine lyonnais, Nabil Fékir, qui n’aura pas soutenu publiquement son entraîneur à l’annonce de son départ mais qui aura toujours été professionnel.

L’apport de Bruno Génésio se situe davantage au niveau de l’harmonie interne qu’il a pu apporter à un club qu’il a toujours tenu en haute estime. Et son mandat, il ne faut pas se le cacher, aura également vu son Président se permettre une politique de vente de quelques-uns de ses meilleurs éléments (Lacazette, Tolisso, Umtiti) à mon avis compréhensible dans une période ou l’OL a construit son nouveau stade et se devait de trouver des financements. Le problème, c’est que l’OL de Bruno Génésio n’aura jamais atteint le niveau que l’on aurait pu attendre d’un club si puissant. Un club qui a remporté 7 titres de Champion de France, certes à une autre époque, mais qui a la culture de la gagne. Il y a bien eu ces quelques frémissements européens cette saison, avec les belles performances face au Manchester City de Guardiola en phase de groupes, mais c’est bien trop peu comparé aux différentes éliminations des Coupes Nationales. Face à cette incapacité récurrente à contourner tactiquement des équipes bien organisées défensivement. Et face à cette fébrilité permanente dans son propre secteur défensif. 

Depay à l’image de l’OL, talentueux mais inconstant. REUTERS/Regis Duvignau

Cette saison face à des adversaires moins puissants que l’OL, comme la saison passée, et avec des progrès dans le jeu qui ne seront jamais arrivés. Le positionnement de Depay aura été une longue interrogation, devant ? Sur un côté ? En 10 ? Et toujours cette impression de ne pas exploiter le potentiel maximum de ses troupes. La saison de Fékir, avec un transfert avorté l’été dernier certes, restera comme un échec également sur le plan sportif. La pépinière de l’OL, elle, se porte bien avec de nouveaux arrivants comme Aouar. Mais le bilan reste bien trop maigre pour un coach qui ne laissera pas un souvenir impérissable en tant qu’entraîneur lyonnais. 

Quel avenir alors pour Génésio ? Un poste dans les bureaux de l’OL est évoqué, mais le technicien a également le droit de vouloir tenter une autre expérience sur un banc de touche. Sans l’étiquette d’enfant du club, et les inconvénients qui vont avec. Il aura souvent été critiqué par les supporters, mais il aura réussi sa mission en tant que serviteur du club lyonnais. Et en cela, Génésio mérite une nouvelle chance.

Emmanuel Trumer